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À J-1 du♀-Day: le jour où j’appris que Causette était…un homme !

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La veille de la journée de la femme, ça reste une journée de l’homme, non ? C’est donc le portrait d’un homme que j’ai choisi de vous brosser, quelques heures avant que les projecteurs ne soient braqués sur nous mesdames.

Naaaan, rassurez-vous, je ne me suis pas levée ce matin avec l’envie de renier mes convictions les plus profondes, bien au contraire. Juste avec le désir de rappeler que l’engagement et la lutte contre les préjugés et discriminations d’ordre sexuel doivent être menés tout au long de l’année (même si demain je serai présente aux côtés de mes copines de « the end of the Bobonnes » pour prendre la parti festif et positif de cette journée) et surtout avec celui de vous prouver que dans cette nouvelle forme de féminisme qui me tient tant à cœur, les hommes occupent une place de choix.

Portrait de Grégory Lassus-Débat, alias « Môssieur Causette » !

Grégory LASSUS-DEBAT, c’est un peu l’homme que les féministes pures et dures redoutent : celui dont on n’arrive pas à dire du mal ! On a beau chercher… on trouve pas.

Déjà, parce que Grégory est bordelais. Vous allez me dire : oui, et alors ? Bah alors je le suis aussi ! C’est subjectif, je sais, et comme je suis carrément chauvine, je trouve que déjà ça en fait un mec bien… Même s’il a quitté la Belle Endormie il y’a une dizaine d’année, ça prouve qu’en contrée girondine, il ne pousse pas que de la belle vigne mais aussi de sérieux talents.

©Christophe Meireis

Grégory Lassus-Débat par ©Christophe Meireis

Ensuite, parce que quand on « googlise » Grégory, et qu’on tombe sur sa photo, personnellement ça réveille plus mon cerveau reptilien que mon côté militant (si si, j’t’assure, vas voir). Oui, en gros, Grégory, c’est plutôt un beau mec. Le jeune trentenaire qui a oublié d’être moche.

Mais comme je ne suis pas sexiste (manquerait plus que ça!), j’insisterai tout autant (voir plus) sur sa « beauté intérieure ». La fameuse…

Malgré son jeune âge (oui, à 30 ans on est jeune, ceci n’est pas discutable !!!), Grégory n’est pas le fils à papa, qui a hérité de son journal ou à qui les idées sont tombées toutes crues dans des mains n’ayant jamais été au charbon. Il a fait des études d’histoire et d’anthropologie, il a connu les fameux « petits boulots ». Non pas que ce soit un critère indispensable pour qu’un homme trouve grâce à mes yeux : après tout, on ne choisit pas sa famille et l’on n’est pas responsable de son lieu de naissance, ceci est donc tout autant valable pour celui paré dès ses premières heures d’une petite cuillère en argent. Mais que voulez-vous, j’ai une tendresse particulière et une admiration sincère pour ceux à qui rien n’était acquis, et qui n’ont pas eu peur d’emprunter les chemins les plus sinueux et pentus pour concrétiser leurs espoirs et projets. Si tu veux en savoir plus, je t’invite à lire ce portrait qui fut fait de lui dans Libération.

Mais surtout, Grégory LASSUS-DEBAT, c’est « Môssieur Causette ». Et ça, ça a autant de quoi surprendre que de quoi nous rassurer : loin d’être l’ennemi public numéro un de la femme, n’oublions pas que quand il œuvre à ses côtés, l’homme est tout aussi légitime. Les hommes féministes, ceux qui aiment les femmes (pas seulement avec certaines parties de leurs corps j’entends…), ça existe, et c’est tant mieux !

« Plus féminin du cerveau que du capiton »

Le magazine « Causette », c’est un peu l’humour potache d’Hara-Kiri, le journalisme étayé de Libération, le refus des conventions d’un Charlie Hebdo (où il fut d’ailleurs stagiaire pigiste), tout ça « à la sauce nana ». Drôle, et sérieux à la fois, féministe mais pas militant, ni cloisonné ou segmentant, pas prise de tête mais nourri de profondes réflexions et enquêtes de terrain.

Dénoncer sans forcément hurler dans un mégaphone quoi…. Tout en rappelant que parfois c’est nécessaire. Valoriser les nanas sans enfoncer les mecs pour autant. Rire de tout, et avant tout de nous-mêmes : et oui, même pour les femmes, c’est possible !

Pas étonnant que chaque mois, Causette laisse le champ libre, du moins l’espace d’une page, à notre « monsieur mot » local, Vincent Falgueyret, ainsi qu’aux autres fesses (plus communément appelées « Agence PoaPlume ») du célèbre « Auguste Derrière », qui sera d’ailleurs invité de la parution du mois de Mars. On est un peu dans le même état d’esprit…

Bon, je ne vous fait pas la bio de Causette hein ? A priori, si tu me lis, c’est que tu connais, j’en suis sûre ! Sauf si tu es un macho-maso qui aime se faire du mal (envoie moi ton 06 en MP, y’a moyen qu’on se marre bien tous les deux pour le coup !).

Si tu ne connais pas, lâche délicatement cette souris, ne panique pas, enfile tes baskets tranquillement, et file chez ton buraliste le plus proche pour faire l’acquisition du dernier numéro de cet ovni mensuel, tu verras, tout va bien se passer. Si c’est dimanche, si tu vis au fin fond de la pampa bourguignonne et que le buraliste le plus proche n’ouvre que demain et à 30km, bon, voici un lien qui t’aidera : www.causette.fr

Moi, la question que je me suis posée, c’est pourquoi un mec a eu l’idée, à un moment donné, de créer un magazine comme ça. Pour l’argent ? Par conviction profonde ? Finalement, après une petite interview téléphonique, la réponse me parait évidente : et pourquoi pas après tout ??? Pourquoi les femmes seules seraient-elles capables de s’adresser aux femmes ? La rédaction du magazine est mixte d’ailleurs.

L’idée est partie d’un petit texte, assorti d’une photo de couverture détournée, dans lequel Grégory décrivait avec humour ce qu’il estimait être « la femme normale », et surtout à la lecture duquel sa petite amie ainsi que les nanas de son entourage on réagi par un unanime « JE M’Y RECONNAIS COMPLETEMENT ! ».

Voyant donc certaines filles se reconnaître plus dans sa prose que dans l’offre journalistique qui leur était destinée (Cosmo, Biba, Femme actuelle, etc), assorti à son naturel militant (que ce soit pour les femmes ou toutes autres sortes d’injustices) Grégory se dit alors : n’y a-t-il pas là une brèche dans laquelle s’engouffrer ?

L’objectif de départ fut donc de combler un manque : il y avait en France une quinzaine de féminins à l’époque (fin des années 2000) qui véhiculaient une image ne correspondant pas à la réalité selon lui mais surtout selon les premières concernées (nous). L’idée était alors née, d’insuffler du « vrai » journalisme dans une presse dite féminine un peu trop superficielle et qui surtout ne ressemblait tout simplement pas aux femmes, en premier lieu à celles qui l’entouraient.
C’est vrai quoi, peut-on qualifier de féminin un magazine comme Biba ou Cosmo, qui donnent à penser aux femmes qu’elles sont imparfaites, elles qui ne ressembleront jamais à ces modèles « photoshoppées » qu’on y met outrageusement en avant ? « Perdre 7 kilos avant l’été », « Test : quelle amoureuse êtes vous ? » ou encore « les it-shoes du printemps » : c’est ça, être une femme ?

Et la 2eme idée, en plus du journalisme sérieux, d’y ajouter cette pointe d’humour dont ces mêmes « féminins » manquaient cruellement, alors que pourtant nous sommes loin d’en être dépourvues…

Ainsi, dans Causette, on valorise, on « portraitise », on rit, on dénonce, on enquête.

L’édito du mois de janvier, par exemple, je le qualifierais de particulièrement « couillu » si cette expression n’était pas un poil sexiste : « Puisque Dieu était une femme… ».

Petit panorama des sujets abordés dans cet opus: la publication du courrier d’un « homme, un vrai » qui réhabilite le machisme, de la BD, le traditionnel « On nous prend pour des Quiches » (ma rubrique préférée), du jeu de mots douteux (celui on l’on se cache la bouche pour rire, ou que l’on ponctue d’un « rooooooh »), politique, enquête sur les inégalités salariales, culture où l’on vous invite à lire autre chose qu’Amélie Nothomb ou Marc Levy et à aller voir un film dans lequel ne joue pas Megan Fox, le portrait d’une entrepreneuse, la minute nécessaire de Bridget Kyoto ou encore la chronique du dr Kapote, de l’écologie, l’épilation sous l’angle de la science (plutôt que « on a testé pour vous 10 cires : notre verdict ! »), des trucs que je ne savais pas (genre que c’est une méga bombasse qui invita la torpille radiocommandée…), des témoignages passionnants, des tranches de vie, un reportage sur les français en Indochine, un test psycho pastiche, de l’histoire, le mec qui a inventé la pilule, un p’tit peu de sexe, des photos et un graphisme soigné. Et surtout, pas QUE des femmes : c’est pas parce qu’on s’appelle Causette et qu’on s’adresse à priori aux femmes qu’on va uniquement parler d’elles !

Un bel objet, donc, stylé et graphiquement soigné, on y revient à plusieurs fois, on se garde certains articles pour plus tard, on a le coup de cœur pour une chronique qu’on accroche sur le frigo, on fait lire une autre aux copines. Le genre de magazine qui ne finira pas dans la poubelle au bout d’une heure, mais sur l’étagère de notre bibliothèque à côté des derniers numéros qu’on a conservés (tu verras, c’est comme les sushis : on goûte une fois et on y est accros…).

Bref, Causette se lit, et ne se survole pas comme la plupart des magazines qui se disent féminins. Attention, ne croyez pas que je critique ou que je me la joue bégueule ou bobo, hein : ça m’arrive aussi de zieuter du côté d’un article zoomant sur la cellulite de Madonna (mon côté « venin » sans doute…) ou me conseillant une couleur de rouge à lèvre la plus adaptée à mon teint de rouquine. La preuve qu’il faut de tout pour faire un monde, monde rempli à moitié d’hommes et de femmes. De femmes qui peuvent être aussi différentes entre elles qu’un homme et une femme peuvent l’être entre eux. CQFD!

Tout comme un homme peut très bien lire un magazine porno et apprécier tout autant un Marianne ou l’Echo des Savanes. Nous sommes pleins de paradoxes, et c’est tant mieux.

Attention (bis), n’allez pas non plus qualifier Causette de magazine militant féministe pur et dur: militant oui, mais contre les injustices en tous genres. Féministe oui, mais pas segmentant. Pas cassant. Causette c’est avant tout du journalisme.

©Papotiche

Papotiche par ©a.quimbre

J’apprends sur la toile que Causette est officiellement née le 7 mars 2009, veille de la Journée de la femme. Hasard ? Peut-être. Peut-être pas. J’ai pas envie de savoir. Ce qu’il en pense de cette journée Grégory ? Comme beaucoup d’entre nous : que la moitié de l’humanité ne saurait se contenter d’une journée. Que c’est un peu ridicule. Il me rappelle un dessin de presse paru l’année dernière, dont nous avons l’un comme l’autre oublié le titre, dans lequel un homme dit à sa femme « allez profite, aujourd’hui c’est moi qui fait la vaisselle ». Bref, si dans le fond il pointe bien du doigt un problème de fond, c’est avec humour qu’il étaye à nouveau sa pensée. J’aime bien…

Alors au final, en quoi Grégory Lassus-Débat est-il, à mes yeux,

un exemple de ce féminisme moderne décomplexé ?

Je ne suis pas sûre qu’il ait la prétention de se qualifier ainsi, toutefois au cours de notre entretien il me rappelle que le féminisme n’est pas un gros mot, et que les injustices et inégalités sont encore bien présentes. Le simple fait de ne pas mettre en couverture de son magazine un mannequin aux mensurations qui « sentent bon » le poisson vapeur et « les deux doigts au fond de la gorge après chaque repas », c’est déjà un acte féministe. Les 80% de femmes qui composent son lectorat sont en mesure de se reconnaître en ces modèles qui –attention- ne sont pas non plus des boudins ou des garçonnes (bah oui, tu crois quoi, qu’il faut être moche pour avoir des neurones mieux agencés ?), mais des nanas « normales ». Pour lui, il y’a encore de nombreux combats à mener : ce n’est pas parce qu’en France la non discrimination est inscrite dans la loi qu’elle est effective au quotidien. « S’il suffisait d’une loi pour changer ce genre de choses, ça se saurait » me dit-il, ironiquement.

Donc féministe, oui, à mes yeux il contribue à cette cause. Pourquoi moderne ? Car aujourd’hui, ce combat c’est avec les hommes que nous le menons. C’est également parce que Causette ne victimise pas la femme (contrairement à ce que son nom pourrait laisser entendre) mais la valorise. Le magazine dénonce oui, mais met avant tout en avant celles qui réussissent, qui ont de l’humour, qui ont du recul sur elles-mêmes, qui ont fait l’Histoire, etc. Ca me donne bien plus envie de  « me sortir le doigt » comme on dit pour me faire une place dans ce monde encore un peu trop phallocentrique à mes yeux que des slogans victimisant et moralisateurs qui auraient tendance à justifier mes échecs à l’avance par l’apitoiement sur moi-même, et au final ont plutôt tendance à me décourager. Ça me rend encore plus fière d’être une femme que certaines féministes qui passent plus de temps à aboyer dès qu’un homme public ouvre un peu trop maladroitement la bouche, qu’à applaudir ces femmes anonymes qui réussissent loin des projecteurs.

Tout ça pour vous dire que Grégory LASSUS-DEBAT est un homme qui aime les femmes, et que je n’ai pas réussi à dire du mal de lui… Moi qui ai si souvent le venin au bout de la langue !

Et vous savez quoi ? Et bien il est loin d’être le seul : le féminisme n’est pas qu’une affaire de nanas, et c’est comme cela que progressivement les choses finissent par avancer, les mœurs par évoluer. C’est quand l’oppresseur, quel qu’il soit, finit par rejoindre l’autre camp, le fait gonfler jusqu’à ce qu’un jour, le camp adverse devienne ridiculement petit au point qu’enfin nous vivions en parfaite harmonie.

En se regardant certes parfois un peu trop le nombril, mais au moins en envisageant un jour de cesser de se regarder le pénis.


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